Pourquoi les sportifs sont-ils exposés à un risque plus élevé de déficit en fer ?
Les missions du fer dans l’organisme
Le saviez-vous ? Nous disposons d’environ 35 à 50 mg de fer/kg de poids corporel, soit l’équivalent de 3 à 4 g pour un adulte. Nos réserves tiennent donc dans… une cuillère à café ! La majeure partie est attachée à l’hémoglobine du sang (65 à 70 % du pool), à la myoglobine du muscle (3 à 4 % du pool) et à certaines protéines cellulaires (cytochromes). Ce qui signifie que le reste est stocké dans d’autres protéines de réserve (ferritine, hémosidérine), s’associe à diverses enzymes (déshydrogénase, hydroxylase), et circule dans le sang lié à la transferrine. Compte tenu de son caractère pro-oxydant, le fer n’existe pas sous forme ionisée libre.
Cet élément participe à 3 missions principales :
- l’oxygénation tissulaire
- la production d’énergie (transport d’électrons au sein de la membrane mitochondriale)
- l’oxydation, la réduction de substrats et la synthèse de divers composés (neurotransmetteurs…) via son rôle de cofacteur d’enzymes
L’organisme des sportifs et le déficit en fer
Habituellement, un adulte perd en moyenne 1 mg de fer/jour via les sécrétions digestives, l’urine, la desquamation de la muqueuse intestinale et de la peau. La fuite est accentuée chez les femmes lors des épisodes de règles (parfois jusqu’à 40 mg de pertes/cycle).
Il est certain que l’activité sportive pratiquée de manière régulière expose les pratiquants à un risque de déficit plus élevé. En effet, l’ischémie intestinale (chute de l’irrigation de l’intestin au profit de celle des muscles, de la peau et du cerveau) qui accompagne l’effort physique est un facteur d’agression de la muqueuse et d’émission de sang dans les selles. L’absence et l’insuffisance d’hydratation à l’effort aggravent ce phénomène.
Or, dans toutes les disciplines qui possèdent une composante de course à pied, l’onde de choc provoquée par l’impact du pied sur le sol accroît le danger d’une rupture de la membrane des globules rouges et donc d’une hémolyse intravasculaire.
De surcroît, l’excès de graisses saturées et les carences en acides gras insaturés au sein de celles-ci augmentent leur rigidité et par conséquent, leur fragilité. L’hématurie (présence de sang dans les urines) serait également générée par la propagation de cette onde choc.
En outre, la course en descente, à l’origine de contractions musculaires excentriques, amplifie l’atteinte des fibres. Les microhémorragies et la réponse inflammatoire subséquentes accentuent les déperditions martiales.
Par ailleurs, la hausse du débit cardiaque, l’accélération du flux sanguin et les turbulences vasculaires qui accompagnent une activité sportive occasionnent un stress mécanique pour les globules rouges. L’obligation pour ces derniers de se déformer pour franchir les capillaires et les chocs subis contre la paroi des vaisseaux élèvent leur risque de rupture et la fuite du fer.
Les pertes sont accrues chez les femmes sportives durant leurs règles. L’élimination par la sueur est minime.
Les signes cliniques d’une déficience en fer
Ils sont multiples et surtout, de survenue tardive. Leur apparition témoigne souvent d’un déficit malheureusement déjà bien instauré.
- Asthénie ou fatigabilité anormale, dyspnée (essoufflement)
- Pâleur de la peau et des muqueuses, chute de cheveux
- Stomatite (inflammation de la muqueuse buccale)
- Palpitations, tachycardie, troubles psychiques (du fait de son implication dans la synthèse des neurotransmetteurs)
- Stagnation de la croissance somato-psychique chez les enfants
- Réduction des capacités physiques à l’effort, baisse des capacités intellectuelles
- Susceptibilité aux infections
C’est surtout la baisse des performances sportives qui incite le praticien à s’interroger sur un possible déficit en fer.
Comment l’organisme se recharge en fer ?
L’entérocyte contrôle majoritairement les entrées et les réserves en fer de l’organisme. Le cycle de vie de cette cellule intestinale est court. Il en naît sans cesse au fond des cryptes de l’intestin où ils s’enrichissent en fer d’origine plasmatique. Parvenu au sommet de la villosité, ils se nourrissent alors du fer des aliments ingérés. La quantité absorbée à ce niveau dépend étroitement de celle initialement prélevée dans le sang.
Plus l’entérocyte arrive chargé en fer au sommet de la villosité, moins il manifeste d’avidité pour le fer des aliments et inversement. L’assimilation du fer ne s’opère donc pas en aveugle mais obéit à un mécanisme de rétrocontrôle finement orchestré par l’intestin. Ainsi, nous percevons aisément que des facteurs portant atteinte au fonctionnement de celui-ci et à l’intégrité de sa muqueuse instaureront rapidement des freins à la correction des déséquilibres.
Stéphane DELAGE – Diététicien et spécialiste en micronutrition
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